
Qui d’entre nous, élus de la République ou simples citoyens attachés à nos valeurs démocratiques, n’a pas été « ébranlé » ce dimanche soir, malgré les sondages qui nous avaient prévenu, par ce séisme politique qui nous attendait pourtant ?
Depuis lundi, les analyses pleuvent pour tenter d’expliquer un phénomène massif qui risque d’engloutir les valeurs de la République : crise économique sans précédent depuis 1929, mondialisation, montée des peurs liées aux phénomènes migratoires et aux attentats, mais aussi décrédibilisation du politique devant le non respect de la parole publique, les promesses politiques non tenues et les engagements non respectés.
Pouvons-nous encore, au moins ce jeudi avant ce scrutin si difficile où nous allons encore demander aux citoyens leur confiance, continuer à pratiquer la schizophrénie ? Pour que cette fois ci, nos remises en cause profondes ne ressemblent pas à de vaines larmes de crocodile, il apparaît très urgent et surtout impératif que nous nous ressaisissions dès ce jeudi, pour « sauver les meubles » de cette crédibilité de la parole politique et que nous fassions preuve ce soir de cohérence en sachant être « grands » face aux menaces qui nous entourent en ces temps obscurs.
Depuis quelques années, notre agglomération Stéphanoise s’est engagée dans un PCET avec des engagements pour aller vers le moins 20 % de gaz à effet de serre. Et ces jours, moi-même et de nombreux autres élus de l’agglomération, nous nous sommes rendus au Bourget pour participer à cette COP 21 dont les conclusions sont si essentielles pour l’avenir de l’humanité sur cette planète. Pouvons-nous continuer à ignorer ces engagements PCET et ces témoignages à la COP 21 ? Pouvons –nous laisser un mauvais signe à la COP 21 ce soir, en votant pour cette pompe à GES alors qu’on espère tous que la COP 21 aboutisse dans les heures à venir sur un accord réellement contraignant et qui réduise à 1,5 % voire 2% l’augmentation de la température de la terre ?
Et il y a à peine deux conseils de Communauté, en octobre 2015, une vingtaine des maires de nos communes de SEM a accepté de signer ce « pacte pour la transition », pour témoigner devant nos concitoyens de l’importance que chacune de nos communes s’engage à des actions climat sur son territoire.
Et voilà qu’à ce Conseil de Communauté de décembre, nous sommes sollicités pour accepter que St Etienne Métropole se porte garant de ce que nous, les écologistes, qualifions de « grand projet inutile » en participant au déficit prévisible de ce projet autoroutier d’A 45 que la société privée d’aménagement n’accepte de financer qu’à hauteur du tiers de ses coûts d’investissement : c’est dire la confiance que cette entreprise privée a en la viabilité économique de ce projet !
Comment pourrions –nous accepter de mettre le doigt dans ce processus de négociation « juste pour voir », en sachant ce qui est demandé financièrement à l’agglomération (plus de 200 millions d’euros) pour garantir cette aventure incertaine ?
Comment nos concitoyens peuvent-ils encore nous croire, quand six jours sur sept, nous leur expliquons nos difficultés à faire face à ces réductions drastiques de l’Etat dans nos dotations budgétaires et que le septième jour, nous lâchions 200 millions d’euros sans frémir, pour ne pas lâcher cet illusoire phantasme de régler les difficultés de trafic entre Lyon et St Etienne par cette nouvelle fuite en avant ? Et en rajoutant ces 200 millions d’euros au budget d’investissement déjà très lourd pour la 3è ligne de tramway ? Nous ne pouvons pas financer ces deux projets ! Il faut choisir ! Pour nous, les écologistes, entre la route et le tram, le choix est évident !
Enfin, comment pouvons-nous nous regarder dans le miroir et surtout dans les yeux de nos enfants ou petits-enfants, en sautant à pieds joints sur nos engagements du PCET d’agglomération avec cette autoroute nouvelle qui supposerait de nouveaux déplacements, des dépenses nouvelles en carburant, mais aussi en matériaux carbonés ? en nous obstinant dans cette société carbonée à l’heure où les chercheurs du GIEC nous invitent à inventer une société sans énergies fossiles ?
Monsieur le Président, vous nous proposez de construire ensemble la Métropole de demain. Nous y sommes prêts, mais pour quelle ambition ? Entrons dans le XXIème siècle par la grande porte en investissant dans les transports propres comme le tram ou dans le Territoire à Energie Positive, …
Chers collègues, St Etienne Métropole de France est la seule agglomération française qui a vu progresser la part des déplacements en voiture. Si nous voulons être une grande Métropole européenne, nous ne pouvons aller à rebours de l’histoire. Si l’A45 se faisait, dans aucun cas, notre Plan de Déplacements Urbains ne pourrait respecter les objectifs rhônalpins et européens de dépollution de l’air. Vous avez ces scénarios et ils sont clairs, l’A45 polluera notre air et pour longtemps. C’est 20 % de trafic supplémentaire, donc autant de surconsommation de carburants fossiles, plus de pollutions et plus de GES.
Les élus des collectivités locales ont voulu s’essayer dans ce projet du XX ème siècle en demandant le devis de cette autoroute. La note est salée.
– 420 Millions pour l’Etat français qui a d’autres priorités.
– 210 Millions pour le conseil général et autant pour St Etienne Métropole.
Vous nous demandez de faire la quête auprès des autres collectivités. Mais les priorités ont changé et vous verrez que dans 3 mois nous voterons l’enterrement définitif de ce projet. Mais dès ce soir, affirmons que nous élus communautaires de SEM n’acceptons pas d’endetter notre agglomération pour ce projet aussi incertain économiquement.
Monsieur le Président, si vous vous lancez dans la création d’un tour de table financier du projet, ne perdons pas de temps, trouvons les 100 millions d’Euros qui manquent pour la mise aux normes de l’actuelle A47 au droit de Rive de Gier. Finançons la réduction du bruit pour les riverains de l’A47 et la RN88
Travaillons ensemble pour que l’amélioration constante de la liaison ferrée se poursuive. Les efforts des collectivités ont payé, ne laissons pas la SNCF réduire les circulations sur cette voie comme elle a tenté de le faire pour le nouveau service 2016. Refusons que la Région se ruine dans ce projet coûteux et aidons-la à améliorer les transports en commun entre la Métropole lyonnaise et la métropole stéphanoise.
N’oublions pas que l’A47 a un rôle essentiel de distribution sur la vallée du Gier.
Rappelons que la majorité des encombrements est provoquée par les trajets pendulaires domicile/ travail que l’A45 ne peut résoudre.
C’est sur ce point qu’il faut faire porter l’effort de SEM, car même si l’ A45 se faisait, il faudra quand même résoudre le problème du transport dans la Vallée et la traversée de Givors.
Soulignons que 60% des déplacements dans la vallée du Gier sont réalisés en véhicules particuliers, face à 4% en transports en commun.
L’argent des contribuables ligériens doit servir les Ligériens : les 840 M€ d’argent public prêts à être mis sur la table suffisent amplement à résoudre techniquement le problème de Givors , unique point d’achoppement : le passage en souterrain de Givors a été chiffré à 280M€
Le budget investissement de SEM pour 2014 était de 104 M€ : Où faudra-t-il rogner encore ?
Enfin, l’A 45 ce sont des centaines d’hectares agricoles sacrifiés au bitume, source de ruissellements abondants et de pollutions. Ce sont aussi des emplois agricoles qui sont menacés, et un impact considérable sur l’arboriculture.
Et rappelons -nous bien qu’une autoroute qui relie un deux pôles économiques, un fort et un plus faible, profite toujours au pôle le plus fort, soit dans notre situation, laisse plus de retombées économiques à l‘agglomération Lyonnaise.
Mesdames et Messieurs les élus communautaires : l’heure est grave ce soir ! Ce vote engage les générations futures non seulement dans une dette financière injustifiable, mais aussi dans une fuite en avant toujours dans des projets carbonés qui nous orientent vers un réchauffement de la planète à un +3 ° inconcevable pour une qualité de vie pour les humains sur terre.
Il est temps de se ressaisir et de renoncer à cette proposition déraisonnable de financer un bout de ce projet autoroutier inutile et dispendieux.
Osons l’audace et le courage politique de parier sur la mobilité alternative et durable, sur d’autres choix de déplacements sur notre territoire !
Osons la cohérence de notre parole publique et de nos engagements politiques !
Dès ce soir, affirmons notre refus de plomber les ressources de notre agglomération stéphanoise et notre volonté de respecter notre PLAN CLIMAT de SEM pour aider à un bel accord pour la COP 21.
Anne de Beaumont, Conseillère Europe Ecologie Les Verts de St Etienne Métropole