Monsieur le Maire,
Nous entrons dans une phase décisive concernant le budget 2006, à un moment où plus que jamais notre société est mise à mal du fait d’une injustice sociale dramatique, où la précarité de l’emploi fait office de politique d’emploi, où les jeunes n’ont droit à aucune reconnaissance tant dans l’emploi, que dans la cité et où ils se heurtent à des discriminations tant pour leur âge, que pour leurs origines variées.
Dans une ambiance de démagogie électoraliste, l’Etat dispense des cadeaux fiscaux aux plus aisés, et au nom du remboursement de la dette nationale, limite le recours à l’impôt sur le revenu. Mais qui dit baisse des recettes fiscales avec cadeaux bien ciblés électoralement et socialement, dit aussi baisse des moyens de l’Etat et donc restriction dans la qualité de nos services publics fondamentaux : moins d’effectifs dans les écoles, les hôpitaux, … et dans les entreprises nationales comme la Poste, les transports ferroviaires. C’est déjà là que les inégalités se multiplient avec échec scolaire, inégalités sociales pour l’accès aux soins de base, …
Mais réduction des moyens de l’Etat c’est aussi le massacre fiscal des collectivités locales. Il n’y a jamais eu compensation totale des mesures de décentralisation. Ce n’est pas un fait nouveau, mais aujourd’hui, le degré de souffrance au niveau de la société est insupportable. Toutes les injustices dont je viens de parler sont vécues au jour le jour par les citoyens, les chômeurs, les jeunes.
Nous avons besoin, et nous le disons haut et fort, de changer de politique en 2007 et en 2008. Mais d’ici là, il y a plusieurs budgets à voter et que fait-on ? Est-ce que nous poussons la démonstration de la nocivité de ces politiques de droite à son paroxysme pour bien démontrer la nécessité de changer ? C’est là une politique du pire que nous Verts, ne nous autorisons pas de pratiquer. Ou bien est-ce que, sans vouloir suppléer l’Etat, nous faisons tout ce qui est dans nos possibilités pour soulager nos concitoyens. C’est la deuxième hypothèse, c’est la nôtre. C’est le refus de la politique du pire, c’est le choix de l’action.
Les communes doivent s’honorer de restaurer, à leur niveau, l’action publique. Et d’abord, gérer c’est prévoir et non subir. Et aujourd’hui, je vois au moins deux raisons essentielles pour lesquelles nos communes doivent être plus gestionnaires des deniers publics à court terme, mais avoir une vision à moyen terme des choix à anticiper pour préparer l’avenir plus qu’incertain à divers points de vue.
D’abord notre commune se doit d’avoir une réelle politique de développement local pour maintenir le plus possible le « vivre et travailler au pays ». Ceci d’abord pour satisfaire aux aspirations croissantes de nos concitoyens à une qualité de vie et à des relations sociales riches, mais aussi pour stopper cette course effrenée aux délocalisations et au morcellement de l’espace entre les zones d’habitat en milieu rural ou péri urbain et les zones d’emploi en milieu urbain. Cette conception de l’étalement urbain est totalement dépassée par le nouveau contexte de raréfaction des matières premières et des ressources énergétiques fossiles.
Comme 80 % des salariés travaillent dans des PME ou TPE, et que Firminy vit aussi beaucoup grâce aux artisans et commerçants, il importe que notre commune ait une vision plus prospective et plus dynamique de ses choix et des incidences de certains travaux sur la vie commerciale locale. Ainsi la commune aurait dû anticiper les effets néfastes et perturbateurs (même si bénéfiques à moyen terme) des travaux autour de la gare et dans certains axes (carrefour du Mas) de la ville, pour « compenser » avec des animations particulièrement dynamiques et attractives à l’occasion des fêtes de Noël qui représentent une part importante du CA annuel des commerçants. A la place de cela, un manège piteux (néanmoins coûteux : eh oui : 6000 euros plus 5000 euros) sur la place du Breuil et quelques misérables petites maisons de Noël. Comparée à n’importe quelle commune de la région ou de France, Firminy faisait pâle figure en ce dimanche précédent les fêtes de Noël. Ne pas anticiper sur des questions aussi vitales pour nos commerces locaux, c’est se couper de nombreux magasins qui font la fierté de la commune et qui attirent encore un peu de l’extérieur de Firminy. Donc attention à bien veiller aux conséquences de politique trop gestionnaire à court terme.
Par ailleurs, notre commune doit comme les autres collectivités locales, anticiper les impacts innombrables de ce nouveau choc pétrolier dont nous ne parlons déjà quasiment plus, alors qu’il produit des effets silencieux profonds : remise en question de la politique des flux tendus, nouvelle gestion des transports de marchandises, réorientation de certaines filières trop dépendantes du pétrole, et bien sûr augmentation des « indices du coût de la construction, des matériaux » comme c’est pudiquement écrit dans le document officiel du DOB , alors qu’il faut parler de TOUTES les conséquences en cascade de la hausse importante du coût du pétrole. Il faut sortir de cette schizophrénie collective qui consiste à voir comme un tabou, le coût de cet or noir qui ne sera bientôt plus.
Pour sortir de cette schizophrénie, il faut préparer DES MAINTENANT l’avenir de notre société où il n’y aura plus de pétrole et où nous devrons nous chauffer, nous déplacer, et produire nos millions de produits manufacturés sans pétrole.
Il est donc urgent d’introduire dès 2006, des politiques d’économies d’énergie, de construire systématiquement des bâtiments économes en énergie et autres fluides (récupération de l’eau de pluie,…). Ces choix profiteront d’abord aux ménages, car un logement social économe en énergie, c’est des factures lourdes ou des impayés en moins …sans compter les effets bénéfiques pour la santé de bâtiments avec des matériaux plus isolants qui évitent les climatisations malsaines et nuisibles pour l’ozone. Les ressources de la commune sentiront vite les effets de ces politiques d’avenir, misant aussi sur les énergies renouvelables (abribus solaires, éoliennes au carrefour d’entrées de ville, toits de logements collectifs photovoltaïques….)
Anticiper ces choix énergétiques dès maintenant, c’est prendre de l’avance sur les autres et c’est se donner les moyens de résoudre ce fameux phénomène de l’ « effet ciseau ». Mais pour cela, il faut OSER et vite, avant que toutes les mentalités n’aient réalisé les effets boomerang de cette révolution silencieuse du pétrole cher.
Ces choix anticipés doivent aussi se mener dans une politique complètement audacieuse en matière de déplacements urbains, avec la promotion des modes doux (piétonniers et deux roues, et accessibilité des PMR) et la priorité aux transports collectifs. Nombreux sont les choix communaux à réorienter pour aller dans ce sens, dont je reparlerais à l’occasion des amendements budgétaires pour le Budget 2006. Mais d’ores et déjà j’ai annoncé 20 mesures que Firminy et SEM pourraient prendre pour faire avancer dans les actes, le développement durable Et cet axe doit être introduit dans la politique d’investissement de la commune, en ne se limitant pas « au renouvellement du patrimoine actuel et aux attentes des Appelous »
Ces choix supposent de recourir plus à l’emprunt pour financer ces choix sur le long terme qui auront d’immenses retours sur investissement (cf récent débat sur notre co génération) .
Il faut donc que nous ayons une programmation pluriannuelle des investissements et une politique d’emprunt correspondante.
Le budget proposé en janvier doit présenter cette programmation pluriannuelle, organiser le recours à l’emprunt pour ne plus traduire notre action politique à moyen et à long terme en dépenses annuelles directes Nous devons rompre avec cette gestion de simple bon père de famille et avoir de l’audace.
Anne de BEAUMONT
Conseillère municipale Verte